On se forme l'esprit et le sentiment par les conversations, Pascal

mardi 7 janvier 2014

L'affront du dauphin

Installez un miroir sur la paroi du bassin dans lequel le dauphin s'ébat joyeusement et, histoire de s'amuser ou de plaisanter, faites une marque colorée à son front. Et que passe-t-il ? Vous remerciera-t-il avec l'un de ses sourires qui vous font croire que vous êtes son plus fidèle compagnon, sautera-t-il de joie hors de l'eau, cet adorable cétacé que l'on sait capable de porter secours à l'homme ? Non ! l'ingrat, l'infâme ira se contorsionner devant le miroir pour voir en quelle manière vous avez porté atteinte à son image. La nouvelle navrante est certifiée par l'expérience, dites le "test du miroir"*, qu'ont mené deux chercheurs américains en éthologie cognitive, Diana Reiss de l'université de Colombia et Lori Marino de l'université d'Emory : autant que la plupart des grands singes, les orques et les éléphants, les dauphins, une des espèces animales les plus intelligentes mais ce n'est pas excuse - sont dotées d'une réelle conscience de soi. Le coup porté à notre orgueil serait déjà assez grave s'il ne fallait également compter parmi ces ego impertinents... le corbeau et la pie ! Décidément, l'année commence mal.


  • www.scientificamerican.com
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    * Le test du miroir, permettant d'évaluer la conscience de soi chez les animaux, fut développé par Gordon G. Gallup dans les années soixante-dix [Gallup GG Jr, "Chimpanzees: self-recognition", Science 1970;167:86–87].
  • 9 commentaires:

    R. D. a dit…
    Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
    Anonyme a dit…

    Que de pages de remerciements je peux vous adresser, vous êtes cette voix altruiste qui s'élève dans le chaos...pour faire jaillir la conscience, "la présence à soi et aux autres" dans la mesure...Principalement,sans votre blog, sans certains de vos livres, je n'aurais pas eu cet élan vital pour continuer à vivre... Je vous dois donc la vie. Et à l'heure où le soleil se lève chaque jour,je pense à vous et j'écris...Un lecteur fidèle.

    MathieuLL a dit…

    Bonjour !

    Oui, c'est bien dit pour l'orgueil humain. Pour ma part, cette expérience n'a rien de surprenant. J'ai toujours été très hostile à une vision cartésienne des animaux comme étant de simples "machines" qui émettent des cris à la manière d'un orgue...
    Mais cela nous montre aussi, cher Michel (c'est mon côté spinoziste et quelque peu freudien qui parle...) que ce que l'on croit être des affections morales (fruits d'une mystérieuse transcendance du Bien sur la nature) peuvent en fait se réduire à des émotions "du corps", entendez par là non pas le corps physique mais l'appareil psychique dont les soubassements pulsionnels, passionnels, c'est-à-dire irrationnels, déterminent des comportements de ce type. Mais cela n'invalide en rien la beauté des diverses expériences émotionnelles, comme celle de la dignité. Cela modifie simplement leur statut ontologique, et par là même métaphysique. Il est possible, je le crois, de penser la beauté, ou la grâce, sans concept de bien et de liberté.

    (Cela n'a rien à voir, mais j'ai découvert hier une musique vraiment tout à fait divine tant le drame et la grâce s'y déploient justement... alors je la partage ici à tout hasard
    http://www.youtube.com/watch?v=ntT2VemnVV8 )

    Michel Terestchenko a dit…

    Mon Dieu, que puis-je répondre à ces remerciements ? Vous levez les doutes que je peux parfois avoir sur l'utilité de ce blog/ Merci de ce baume.

    marcus a dit…

    Cette phrase entendue (drôle...?) à la radio ce matin en écho à votre billet...

    "Personnellement j'ai toujours eu peur des animaux, ils ressemblent tellement aux hommes..."

    Je vous souhaite aussi une excellente année 2014 avec la pleine conscience de la Beauté de la Vie, dans sa force comme dans sa fragilité, et de la possibilité pour vous, cher Professeur, d’occasionner, ici, d’autre élan vital à cette belle Vie…

    marcus

    Anonyme a dit…

    Je me suis toujours demandé pour qui se prend l'Homme. Quel arrogance..Il se croit seul dans l'univers.. Il se croit la seule intelligence sur Terre. Et puis quoi encore ?
    L'Homme est habité par l'ethnocentrisme à toutes les échelles. Je n'ai jamais compris pourquoi on était catégorique avec toutes ces choses. Les savants, les doctorants sont eux-même conditionnés par leur savoir à tel enseigne qu'ils sont coincés dans les ornières d'un chemin préci.
    Jusqu'en 1995 on était sceptique sur l'existence d'autres planètes dans l'univers. Aujourd'hui on en compte des centaines. On était aussi surpris de la proximité de la 1ere exoplanète avec son étoile... Toujours - dans l'erreur - après avoir découvert les premières exoplanètes, on croyait que les trajectoires des planètes de notre système solaire était la règle qui s'appliquait à elles ( toutes les exoplnètes de l'univers ). Et oh miracle, on s'aperçoit que les exoplanètes pour la plus grande majorité tournent autour de leur étoile sur une trajectoire ovale.
    On peut faire l'analogie avec cette découverte.
    Pétris de certitudes nous croyons que tout ce qui nous environne au niveau de la faune est plus bête que nous. Si nous n'avions pas nos symboles qui nous permettent d'aller tellement plus loin, nous serions instinctivement à leur niveau.
    Kennel

    Patrick Schmitt a dit…

    L'homme seul animal pensant de la création... HA !


    Pour faire écho au commentaire précédent, et pour une fois aller s'amuser à philosopher en bande dessinée, voici un album pas toujours facile à se procurer mais qui semble être en cours de ré-éedition : Demain les dauphins de Miguelanxo Prado.


    Bonne lecture !
    Patrick Schmitt(L3)

    Priscillia COELHO MOUTINHO a dit…

    L’Homme est un animal bien vaniteux se considérant comme supérieur à tous les autres êtres vivants. Cette supériorité -parfois imaginaire- met à mal la cohabitation, ainsi que la coexistence au sein de notre espace de vie commun : la terre.

    Comment serait-il possible de vivre en harmonie, si nous continuons, encore aujourd’hui, à avoir une main mise sur les autres espèces ? Cette harmonie serait d’autant plus compliquée pour certain, s’ils devaient admettre que ces espèces, tout comme nous, homo sapiens sapiens, possèdent une conscience de soi.

    La conception aristotélicienne persiste encore régulièrement de nos jours. Nombreux sont ceux considérant que les animaux n’ont aucune conscience, et que ce ne sont que de vulgaires choses que l’Homme peut utiliser à sa guise (à but récréatif et surtout économique).

    La multiplication des expériences en éthologie cognitive est essentielle, ne serait-ce pour éclairer un tant soit peu les esprits sur l’importance de considérer tout être vivant comme égal de l’Homme.

    Je vous invite, par la même occasion, à vous pencher sur les œuvres de Pinter Singer, de Will Kymlicka ou, sur des œuvres moins récentes, comme celles de Plutarque.

    Bartlett Electricians a dit…

    Thanks greatt blog post