On se forme l'esprit et le sentiment par les conversations, Pascal

vendredi 6 décembre 2013

L'accès au droit : du droit au droit à l'insécurité juridique

En mémoire du pacificateur, aujourd'hui disparu, dont il n'est pas nécessaire de faire une icône pour que soient honorés son courage et sa grandeur d'âme. En tenue de prisonnier, en habit de président, l'homme avait l'allure et les modes d'un grand seigneur. Il est vrai qu'il était de descendance royale.

Conférence prononcée aujourd'hui à Sciences-Pô Aix, lors du colloque "L'accès au droit" :

« Expression élémentaire du souci de sécurité juridique, l'accès au droit est devenu le dogme par excellence […] Accéder au droit est aussi nécessaire qu'accéder au savoir ou aux soins : une condition du respect de la dignité de la personne humaine. Pour cette raison, l'accès au droit est désormais érigé en facteur de la lutte contre l'exclusion. », note le professeur Nicolas Molfessis de l'université Panthéon-Assas [« La sécurité juridique et l'accès aux règles de droit »]. Les politiques publiques et les textes législatifs qui ont mis en place, depuis les années 1990, les nouveaux dispositifs institutionnels de l'accès au droit répondent, en effet, à deux finalités complémentaires, l'une de sécurité juridique qui va bien au-delà des exigences traditionnelles d'accessibilité, d'intelligibilité et de prévisibilité des normes, l'autre de lutte contre les inégalités sociales dans la logique de solidarité et de garantie effective des droits individuels propre à l'Etat-providence.

Au-delà des droits formels

La capacité à connaître et à exercer ses droits est une composante essentielle de la citoyenneté dans une société démocratique et c'est sans doute une des plus formes les plus insidieuses de l'exclusion que de se trouver, pour des raisons diverses et pas seulement financières, incapable de connaître et de faire valoir ses droits, entendus en un sens bien plus large que les seuls droits juridiques. L'accès au(x) droit(s) – et la notion doit s'écrire aussi bien au singulier qu'au pluriel – est un principe reconnu et consacré par le droit positif français et européen [Dans un arrêt Golder c. Royaume-Uni, en date du 21 février 1975, la Cour européenne des droits de l’homme consacre un droit d’accès à un tribunal ; voir également le célèbre arrêt Dame Lamotte du Conseil d’État par lequel la Haute juridiction reconnaît un droit au recours ouvert, même en l’absence de texte, contre tout acte administratif.] Mais il ne suffit pas de consacrer un droit pour qu'il soit effectif. Il demeure purement formel et abstrait si des franges entières de la population ne peuvent y avoir recours. La finalité des nouveaux dispositifs législatifs est de restaurer tout à la fois l'accès au droit et le lien social chez les populations les plus vulnérables et cette double finalité ne saurait se réaliser sans le concours d'acteurs multiples, appartenant autant à la puissance publique qu'au milieu associatif, dans un maillage serré qui va au-devant de ceux et de celles qui ont perdu jusqu'au désir de faire valoir leurs revendications légitimes. Les objectifs sont multiples, mais tous obéissent à l'intention de développer, voire de rétablir l'autonomie des personnes, en particulier des personnes les plus démunies, par la prise de conscience de leurs droits. Le but est de restaurer leur sentiment abimé d'estime de soi, « de les valoriser socialement, de faire en sorte qu'elles soient le plus possible actrices de leur vie et non pas spectatrices des déterminismes qui les accablent » note Jacques Faget [« Accès au droit et pratiques citoyennes. Les métamorphoses d'un combat social »].
Les politiques de l'accès au droit ont vocation à aller au-delà de la simple aide juridictionnelle, prévue pat la loi de 1991. Il ne s'agit pas non plus de promouvoir seulement un meilleur accès à l'information juridique ou encore de favoriser le règlement à l'amiable des litiges pour conjurer la juridicisation croissante des rapports sociaux, même si ce sont là les finalités premières de la loi 1998. Ces lois ne sauraient être interprétées seulement, ni peut-être même principalement, comme une réponse de la puissance publique à des droits-créances, sortes de réclamations indéfinies des individus envers l'Etat en général et les tribunaux en particulier : il s'agit bien plutôt de restaurer la conscience d'être un acteur social à part entière, un sujet porteur de droits et d'obligations, chez ceux qui, dans le pire des cas, ont cessé de réclamer quoi que ce soit, sont devenus invisibles et ne demandent donc rien. Les politiques d'accès au droit ne doivent donc pas être comprises seulement comme la réponse adéquate à une demande sociale de droits, même si, fort heureusement, celle-ci existe également et constitue peut-être l'essentiel du travail accompli par les conseils départementaux de l'accès au droit (CDAD), quoi que soit de façon très inégale selon l'intérêt que les collectivités territoriales portent à cette mission d'utilité publique.

La priorité du « aller vers »

Dans cette affaire, le rôle historique d'aiguillon, si j'ose dire, de certaines associations militantes, telle l'association Droits d'urgence, mérite d'être souligné, et il faut aussitôt souligner le partenariat qu'elles ont développé avec les professionnels s'occupant des personnes les plus démunies puis, le temps étant enfin venu, avec les pouvoirs publics eux-mêmes.
Le premier point que je voudrais souligner, et je ne crois pas forcer le trait, est que la finalité qui devrait animer les politiques publiques de l'accès au droit, et qui les anime diversement selon les situations locales et les acteurs en présence, ne vise pas seulement à donner les moyens, financiers, intellectuels, etc. en vue de satisfaire une revendication légitime de droits. Il vise ou devrait viser prioritairement à recréer les conditions d'une telle demande chez les personnes qui l'ont perdue. Il convient donc partir des situations extrêmes d'exclusion, et pas simplement de précarité ou de pauvreté relative, pour saisir ce dont il s'agit, puis, par degré d'intensité décroissante, de descendre du plus dramatique au plus ordinaire. C'est ainsi seulement que l'on peut comprendre en quelle manière les politiques d'accès au droit peuvent répondre à des finalités diverses mais qui ont toutes pour but le renforcement (empowerment) de l'identité et le sentiment d'estime de soi des individus qui sont privés non seulement de biens matériels mais de ces biens intangibles que constituent, selon le chercheur américain Stephen Golub, la capacité à défendre ses droits.
En partant des situations où l'accès au droit se trouve le plus mis en péril – malades mentaux, détenus, personnes sans domicile fixe ou en situation de désocialisation - on comprend que la possibilité effective d'exercer librement ces droits est l'une des conditions d'exercice de la citoyenneté et, plus encore qu'un droit abstrait, formellement garanti, une capacité fondamentale, inscrite dans la dignité humaine. La difficulté, c'est que, dans certains cas, cette capacité ne peut s'exercer sans un premier mouvement qui consiste à « aller vers », dès lors que les plus pauvres ne vont pas vers les recours qui leur sont destinés et qu'ils subissent le droit bien plus qu'ils n'en sont les acteurs, ainsi que le souligne Nicole Maestracci, membre depuis mars 2013 du Conseil Constitutionnel et qui est à l'origine de la notion controversée de « droit opposable ».
On pourrait formuler l'hypothèse que si les politiques d'accès au droit se sont progressivement imposées comme une sorte d'obligation et peut-être même d'urgence démocratique, c'est en raison de cette ouverture asymétrique qui ne répond à aucun appel, une ouverture venue du monde associatif mais appelée à se propager progressivement au législateur et à la puissance publique et qui consiste à « aller vers » vers les populations et les individus qui, par eux-mêmes, sont incapables d'un pareil mouvement. Mais, dans cette affaire, ce ne sont ni la loi ni la puissance publique, nationale ou territoriale, qui ont eu l'initiative du commencement1 et le commencement à quoi il faut donner la priorité, ce sont précisément les plus démunis qui échappent aux dispositifs d'aide et que les institutions n'ont pas pour « culture » d'aller débusquer. Comme le dit encore Nicole Maestracci : « Aller vers », c’est une révolution pour l’ensemble des dispositifs sociaux et pas seulement pour les Maisons de justice et du droit. » De là sans doute la résistance ou l'indifférence de certains départements à mettre en place des CDAD qui soit autre chose que des organismes fantômes ou inefficaces.
Quelles soient ces différences et l'origine de ces politiques, ce à quoi nous assistons, malgré tout, c'est à un souci de la part de la puissance publique de garantir ce « droit au droit » dont personne ne doit se trouver exclu. Et c'est en considérant la situation la pire, qu'on saisit à quel point la capacité effective d'exercer ce droit est impliquée dans le principe normatif de sécurité juridique. Mais dans le même moment, et ce point mérité également d'être souligné, l'inflation croissante du droit, à la fois national et communautaire, conduit à une situation d'insécurité juridique généralisée de plus en plus grande dans un paradoxal mouvement en sens inverse.

Une insécurité juridique croissante

L'accès au droit est évidemment une manière de répondre à la présomption de connaissance du droit en vigueur par les justiciables. Selon l'adage bien connu, nul n'est censé ignoré la loi et cela vaut pour toute personne résidant sur le territoire national, quel que soit son niveau d’éducation et son statut (étranger en séjour dans le pays ou citoyen français, majeur ou mineur, infirme ou valide). Ainsi que le fait remarquer Emmanuel Cartier de l'université Paris I : « Cette présomption traduit une fiction : celle d’une société de juristes éclairés. La société juridique est bâtie sur une fiction qui a comme conséquence indirecte l’obligation pour tout justiciable de se tenir informé des règles juridiques qui régissent la grande variété des relations qu’il peut entretenir dans la société » [« Accessibilité et communicabilité du droit », Jurisdoctoria n° 1, 2008]. Mais comment peut-on répondre à cette obligation, elle-même fondée sur une fiction, dès lors qu'on assiste à une inflation exponentielle du droit positif (national et communautaire) ? Quel accès au droit dans ces conditions ?
«Les normes édictées doivent être claires et intelligibles, et ne pas être soumises, dans le temps, à des variations trop fréquentes, ni surtout imprévisibles», rappelle le Conseil d'Etat dans son rapport critique de 2006, intitulé « Insécurité juridique et complexité du droit ». La sécurité juridique est un principe général de droit communautaire reconnu par un arrêt de la Cour de justice des Communautés européenne [arrêt Bosch du 6 avril 1962] . En France, le Conseil constitutionnel reconnaît, dans une décision du 16 décembre 1999, une valeur constitutionnelle à l'objectif « d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi » ; principe réaffirmé à l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2006 : dans sa décision du 29 décembre 2005, il censure une disposition relative au plafonnement global des avantages fiscaux, en raison de son excessive complexité, qu'aucun motif d'intérêt général ne suffit à justifier. Le Conseil d'Etat, qui en fait déjà application dans l’exercice de ses fonctions consultatives, consacre le principe de sécurité juridique dans une décision du 24 mars 2006 [Société KPMG et autres]. En matière judiciaire, la Cour de cassation prend également en compte les exigences découlant de ce principe.
Le nombre de textes de portée générale en vigueur ne cesse pourtant de croître : on estime qu'aux 9 000 lois et 120 000 décrets recensés en 2000 sont venus s’ajouter, en moyenne, 70 lois, 50 ordonnances, et 1 500 décrets par an. A titre d’exemple, le Code du travail comporte 2 000 pages. Le Code général des impôts compte, pour sa part, plus de 2 500 pages et regroupe 4 000 articles législatifs et réglementaires. Il résulte de cette prolifération que le droit devient de plus en plus instable, illisible et peu prévisible.
Ce ne sont pas ici seulement les plus démunis qui se trouvent perdus dans ce dédale de normes et de règlementations, mais les citoyens dans leur ensemble, les entreprises elles-mêmes qui se désespèrent et souvent les professionnels du droit, magistrats y compris, de sorte que l'idée noble d'un accès de règles accessibles à tout citoyen relève davantage d'un fantasme que d'un but réalisable. On pourrait tout de même se demander dans quelle mesure une telle inflation législative et réglementaire est compatible avec le principe libéral de limitation de la souveraineté de l'Etat, mais c'est là une question plus générale qui dépasse de loin notre sujet du jour. Accès au droit, oui, mais restriction du droit, ce ne serait pas mal non plus pour pouvoir mieux le connaître, le comprendre et s'y tenir. On est loin de cette évolution qui obéit, paradoxalement à des logiques opposées. L'accès au droit protège et socialise, l'inflation du droit rend la société entière plus instable. Sécurité d'un côté, insécurité de l'autre. Plaisante application dans notre République laïque du précepte évangélique selon lequel la main gauche doit ignorer ce que fait la main droite !

8 commentaires:

Michel Terestchenko a dit…

"Sans grand intérêt", évalue un lecteur de ce billet - le seul à avoir laissé une évaluation - dont le sujet porte sur un sujet essentiel qui mobilise la puissance publique et surtout des acteurs bénévoles, magistrats et avocats, au service des plus démunis. On se demande ce que certains viennent faire ici. Quelle que soit cette personne, je la prie à l'avenir de passer son chemin.

Gasp a dit…

Ça va mieux en le disant.. Sujet d'importance dont la portée m'échappait ! Merci pour cette synthèse d'un grand niveau.

Dominique Hohler a dit…

Ne souffrons-nous pas une fois de plus de notre criant déficit d’éthique ? De Rabelais à Arthur Koestler, nous sommes confrontés à l’écrasant déséquilibre entre science et conscience. La science et la technique sont par nature complexes, le droit qui n’est que l’expression de la réalité sociale est lui aussi par nature complexe. L’accès à la science et à la technique est de plus en plus ardu, il en va de même avec l’accès au droit. Le citoyen n’est ni médecin, ni ingénieur, ni juriste. Ce qui distingue les techniciens de la science des techniciens du droit c’est que les uns découvrent les normes et que les autres les produisent et ce qui les unit c’est que du pouvoir né de leur savoir, ils peuvent faire le pire comme le meilleur usage. L’éthique est un éclairage porté sur l’usage que fait le technicien de son savoir.
Je veux dire par là qu’il est illusoire de lutter contre l’inflation législative (même si davantage de cohérence serait la bienvenue) ; le chantier n’est pas chez les juristes, il est chez les philosophes, il s’agit de travailler à ce que l’éthique rattrape la technique.
Les juges ont besoin de cet apport, c’est lui qui leur a permis par exemple d’intégrer la déclaration des droits de l’Homme dans le droit positif et c’est lui qui leur a permis de proprement inventer la notion de principes généraux du Droit.
L’accès à leurs droits et l’accès au Droit pour les plus démunis est affaire de pratique éclairée plus que de technique juridique, il est en tant que révélateur du degré de démocratie, une marque de cohérence entre l’édifice juridique et les principes dont nous nous réclamons. Encore faut-il que ces principes soient travaillés, actualisés, perfectionnés, interrogés et confortés.
Et ça c’est notre boulot, chers amis, chers collègues.

Dominique Hohler

MathieuLL a dit…

Bonjour à tous,
Oui, la question du droit est complexe, et oh combien avez-vous raison, cher Dominique, lorsque vous dites que nous avons un criant déficit d'éthique. Philosopher sur le droit est très utile (et passionnant d'ailleurs) en théorie, mais, malheureusement cela est plutôt pauvre dans la pratique. Nous contribuons tous à rendre difficile l'accès au droit pour certains (Afrique notamment) parce que, tant que nous apporterons nous aussi notre pierre à l'édifice de la mondialisation, nous favoriserons la croissance de ces multinationales qui exploitent les laissés pour compte de la planète. Si vraiment nous étions vertueux, nous réformerions nos modes de vie (fini les outils informatiques dont la production nécessite des matières premières que l'on va piller en Afrique, fini la nourriture qui est fabriqué de façon industrielle dans les mêmes conditions, etc.). Alors que faire ? Se révolter contre le système à la manière des anti-mondialistes ? Ce serait un autre problème : le monde est à présent configuré sous le modèle que nous connaissons (capitalisme, libéralisme) et toute modification à ce stade engendrerait des conséquences désastreuses. Alors il ne reste plus qu'à regarder le scénario du monde se dérouler... impuissants que nous sommes à le modifier. Alors, si ma vision est "terroriste" au regard de Kant, et si cela nous met quelque part mal à l'aise, qu'attendons-nous pour nous réformer en profondeur ? Plutôt que de louer les altruistes de la planète, relevons les manches et allons VRAIMENT aider notre prochain... Mais il faut bien des intellectuels en amont ! Cruel dilemme que de danser entre la théorie et la pratique...
Merci pour ce billet un peu long, certes, mais instructif.

Anonyme a dit…

Merci pour cet article qui dit haut ce qui se passe tout bas.Un lecteur fidèle

Cherel Pascal a dit…

Mr Terestchenko

J'ai consulté votre Blog durant
l'année dernière qui m'a beaucoup
aidé personnellement au niveau de
la réflexion,je vous remercie pour ce texte qui touche à des
des problèmes cruciaux

Sincères Salutations

Cherel Pascal

Anonyme a dit…

je n'assimilerais pas la production des normes juridiques à une science, surtout celles régissant les droits essentiels de l'individu. Une science bien menée 'avec éthique" conduit en principe à un bien être général, y compris pour les plus démunis (ex la médecine dont le langage abscons pour la majorité d'entre nous n'a rien à envier avec le droit (je ne parle pas des effets de style contenus dans les considérants d'arrêts qui font souvent le "bonheur" des étudiants de première année de droit. La science est censée garantir progrès de l'humanité, ce qui n'est pas forcément le cas pour le droit qui évolue souvent moins vite que les mentalités. Je crois que la scence s'incrit dans une démarche prédictive dont est bien incapable le droit parce que celui ci s'intéresse au seul domaine de l'homme, qui est par nature insondable et imprévisible. Le droit repose encore un peu trop à mon avis sur des données empiriques La science se fonde sur des éléments objectifs et/ou des données prévisibles et récurrentes pouvant être évaluées et corrigées après coup. Si la méthode scientifique employée est mauvaise on la change, les effets secondaires pouvant toujours être éliminés le cas échant par un nouveau processus. Une règle de droit peut être amendée a posteriori bien évidemment mais il sera quasiment impossible d'en modifier les effets (théorie des droits acquis) La remise en cause d'une situation acquise esr souvent vécu comme un gage d'insécurité, voire de discrimination (ex les lois fiscales récentes) Le droit aujourd'hui, contrairement aux grands principes qui le sous-tendent, ne revêt plus ce caractère général, impersonnel et obligatoire que l'on est en droit d'attendre d'une norme juridique. On note de plus en plus des textes à portée limitée, visant telle catégorie de la population. On peut se réjouir du caractère discrimant de certaines règles juridiques, adoptées dans un souci louable d'équité mais à vouloir trop les multiplier, celles ci finissent par avoir une portée relative au même titre que n'importe quelle norme sociale.
Au plaisir de vous lire.
Laurent D

Dominique Hohler a dit…

Cher Laurent
La science est sans âme (c’est ce que lui reproche Heidegger), elle découvre dans l’intime de la matière des lois qui échappent à nos perceptions. Elle va jusqu’à découvrir que même les lois de la logique n’ont pas cours quand on observe la matière au plus près. Les tenants du positivisme juridique rêvent d’un système normatif, qui à l’instar de la nature régit sans coloration morale les sociétés humaines. C’est en cela que j’assimile les normes découvertes et les normes produites. Pour le droit naturel (celui des juristes pas celui de Hobbes), les normes juridiques peuvent et doivent faire l’effort de tordre le cou à l’inhumaine logique des choses. Seule la religion pouvait contrer ou compenser cette inhumanité. Elle ne le peut plus de nos jours. Si comme moi vous convenez que le positivisme juridique nous mène tout droit à une catastrophe, nous nous retrouverons sans doute sur l’idée que contre l’opinion répandue qui considère que nos sociétés n’ont pas besoin de philosophie, une tâche colossale nous attend : celle de refonder une éthique sans dieu.

Dominique Hohler