On se forme l'esprit et le sentiment par les conversations, Pascal

mercredi 15 octobre 2008

Milan Kundera, livré à la meute

"Selon des documents d'archives exhumés tout récemment, un rapport de police datant de mars 1950 identifie Milan Kundera comme source de renseignements ayant conduit à l'arrestation de Miroslav Dvoracek, un homme qui avait fui la Tchécoslovaquie après le coup de Prague en 1948 et avait rejoint un service secret dirigé en Allemagne par des émigrés tchécoslovaques.
Le rapport de police en question a été découvert par Adam Hradilek, de l'Institut tchèque d'étude des régimes totalitaires, et l'hebdomadaire tchèque Respekt s'en est fait l'écho.
Dvoracek avait franchi les montagnes à la frontière tchécoslovaque pour retourner incognito dans son pays dans le cadre d'une mission en 1950. Une amie l'avait hébergée dans sa chambre, dans une résidence universitaire, mais Kundera, selon le rapport, avait eu vent de sa présence et l'avait signalée à la police.
"Je n'ai jamais vu cet homme, je ne le connais pas du tout", a affirmé Kundera à l'agence CTK.
"Ce n'est pas vrai, le seul mystère que je ne peux pas expliquer est la façon dont mon nom s'est retrouvé là", a-t-il ajouté.
L'homme dénoncé avait été arrêté pour trahison, espionnage et désertion, et il a fait 14 ans de détention, notamment en camp de travail dans une mine d'uranium."

  • www.lexpress.fr

    Comment peut-on mettre en cause et souiller l'honneur d'un homme - serait-il un écrivain mondialement célèbre - sur la seule foi d'une fiche de police ? Ne sait-on pas, et d'autres exemples peuvent être donnés, que, provenant des archives des régimes totalitaires - tel était le cas de la Tchécoslovaquie dans les années cinquante - de tels documents doivent être maniés avec la plus extrême précaution ? Les historiens et les chercheurs qui travaillent sur de semblables matériaux le savent pertinement. Bronislaw Geremek, cette admirable figure de la dissidence polonaise, fut victime, peu de temps avant sa mort, d'une accusation comparable. Mais qu'importent ces réserves, si c'est là l'occasion bénie de faire un coup médiatique dont il sait qu'à l'instant il sera répercuté dans le monde entier ? Les journalistes qui ne répugnent pas à diffuser ce genre d'informations brutes, sans s'être au préalable livrés à une enquête approfondie - est-on seulement allé voir Kundera pour lui demander ce qu'il en est ? - dérogent aux élementaires précautions déontologiques du métier. Ce n'est pas la vérité qu'ils servent, mais les appétits de la meute !
  • 2 commentaires:

    Charlotte Bousquet a dit…

    D'un autre côté, ce n'est pas très étonnant... Le côté "médiatique" avant la vérité, Si ?

    Anonyme a dit…

    Et si c'était vrai, qu'est-ce que cela changerait ? J'ai lu dans un très beau livre l'idée de la banalité du bien et de la banalité du mal. Kundera deviendrait-il entièrement mauvais s'il avait fait cet acte dans sa jeunesse ? Le remords a pu être aussi un ferment de sa création et même de sa bonté (on me souvient du magnifique film "l'île", recommandé avec raisons par notre blogueur préféré).
    Lara.